Pourquoi entendons-nous ?
Le mécanisme de l’audition humaine peut se résumer de la façon suivante : les ondes sonores transportées par l’air font vibrer le tympan, celui-ci diffuse cette énergie aux osselets situés dans l’oreille moyenne et les fait vibrer à leur tour. Ces derniers poussent alors le liquide de l’oreille interne contre des membranes qui produisent des forces de cisaillements. Ces membranes tirent ensuite sur des cellules sensorielles ciliées qui activent les neurones environnants. Ces neurones produisent des influx qui arrivent au cerveau. Celui-ci les interprète alors et nous permet d’entendre ! Nous allons revenir sur chacune de ces étapes.
Les ondes sonores
Le son est une perturbation de la pression causée par un objet vibrant (par exemple un diapason, la corde d’une guitare ou les cordes vocales) ; ce sont les molécules de l’air ou d’un milieu qui le propagent. Le son ne peut donc pas se diffuser dans le vide. Afin de le prouver, nous avons réalisé l'expérience suivante : nous avons déposé sous une cloche à vide un téléphone portable. Ensuite, nous avons fait le vide sous la cloche et pour terminer, nous avons appelé ce portable pour le faire sonner. En conclusion, nous n’avons pas entendu la sonnerie. vidéo cloche à vide
L’objet vibrant, une corde de guitare par exemple, produit une zone de haute pression en se déplaçant de droite à gauche. Tout d'abord, elle comprime les molécules d’air à droite puis en revenant vers la gauche, elle comprime alors l’air en créant une dépression. Les molécules d’air de cette zone ont déjà été poussées plus loin vers la droite. Ainsi, la corde de guitare en vibrant crée une série de zones de compression et de dépression : c'est-à-dire une onde sonore. On peut représenter graphiquement cette onde sonore par une onde sinusoïdale, les crêtes sont formées par les zones de compression et les creux par les zones de dépression. Nous avons pu vérifier à l’oscilloscope que les ondes sonores étaient sinusoïdales, peu importe l'instrument ou la musique utilisé.
Cette onde périodique est caractérisée par sa longueur d’onde ou fréquence, plus la longueur d’onde est courte, plus la fréquence du son est élevée. L’ouïe humaine est sensible aux fréquences de 20 à 20 000 Hz. Plus la fréquence est élevée, plus le son est aigu, il est alors question de hauteur de son. Lorsqu'un son possède une seule fréquence, dit "son pur", par exemple la note do en musique, on parle de timbre. Ce timbre permet la richesse et la complexité des sons et de la musique. La plupart du temps, les sons sont composés de plusieurs fréquences. L’intensité d’un son correspond à l’amplitude ou la hauteur entre un creux et une crête. Elle est liée à la différence de pression entre les zones de compression et de dépression. On parle aussi de la force du son mais celle-ci est subjective. L’intensité se mesure en décibel (dB), c’est une unité logarithmique car le champ auditif humain est très étendu, il couvre plus de 120 dB. On estime que le seuil de la douleur se situe à 130 dB et que l’exposition fréquente à des sons de plus de 90 dB cause une perte auditive importante.
Voici deux schémas représentant chacun une onde sonore à une fréquence différente :
Schéma d'une onde sonore à 1Hz
Schéma d'une onde sonore à 2,5 Hz
La transmission du son dans l’oreille
L’oreille humaine se compose de trois régions qui servent à l’audition : l’oreille externe, l’oreille moyenne et l’oreille interne. Cette dernière participe également au mécanisme de l’équilibre de l’homme.
Dans l’oreille externe
Les ondes sonores, créées, par exemple par les notes de musique, puis transportées par l’air parviennent ainsi à l’oreille externe, composée du pavillon et du conduit auditif. Le rôle du pavillon est de capter et de diriger le son dans le conduit auditif, il s'agit d'un petit tube courbé reliant le pavillon au tympan, pour enfin atteindre l’oreille moyenne.
Dans l’oreille moyenne
Les ondes sonores pénétrant dans le conduit auditif frappent la membrane du tympan et le font vibrer à la même fréquence que celles-ci. A noter que le tympan ne peut vibrer librement que si la pression exercée sur ces deux surfaces est égale. Plus l’intensité du son est grande, plus le mouvement du tympan est ample. Ce mouvement est amplifié et transmis par les 3 osselets (le marteau, l’enclume, et l’étrier) situés dans l’oreille moyenne à la fenêtre vestibulaire ou ovale qui est « l’entrée » de l’oreille interne. Dans l’oreille moyenne, deux petits muscles (le muscle tenseur du tympan et le muscle stapédien) permettent de filtrer les basses fréquences pour pouvoir mieux distinguer les voix humaines qui comportent beaucoup de hautes fréquences pour mieux entendre une conversation dans un milieu bruyant.
L'oreille moyenne multiplie la pression exercée sur le tympan par 20 environ grâce à deux processus mécaniques : d’une part, la chaîne des trois osselets fait effet de levier et d’autre part, la surface de la fenêtre ovale est bien plus faible que la surface du tympan.
Dans l’oreille interne
L’oreille interne, appelée également labyrinthe, contient essentiellement deux organes sensoriels l’organe de l’audition constitué par la cochlée et l’organe de l’équilibre (le saccule, l'utricule du vestibule et les canaux semi circulaires). La cochlée est une cavité osseuse spiralée et conique : ce conduit cochléaire est constitué de 3 tubes : le canal cochléaire, la rampe vestibulaire et la rampe tympanique. Au centre, le canal cochléaire qui abrite l’organe spiral ou organe de Corti, le récepteur de l’audition ; ce canal contient l’endolymphe, un liquide riche en ions potassium et la membrane tectoriale. Le plancher du canal cochléaire est composé de la membrane basilaire de la cochlée : sa structure a un rôle essentiel dans la réception du son. De part et d’autre du conduit se trouvent la rampe vestibulaire et la rampe tympanique qui communiquent au sommet de la cochlée appelé hélicotréma. Les deux rampes contiennent la périlymphe, liquide similaire au liquide cérébro-spinal. Ces deux liquides transmettent les vibrations sonores.
Les ondes sonores sont transmises par les vibrations de l'étrier qui déforment la fenêtre ovale. Elles provoquent des mouvements liquidiens, aussi bien dans la rampe vestibulaire que dans le canal cochléaire ; les ondes se propagent de la base vers le haut comme une corde que l’on secoue. Avant même d’atteindre les récepteurs auditifs, les signaux sonores sont traités mécaniquement : les sons de très basse fréquence (<20 kHz) créent des ondes qui traversent toute la cochlée (rampe vestibulaire – hélicotrema - rampe tympanique et fenêtre de la cochlée) sans activer l’organe spiral – nous ne les entendons pas ! Les sons de fréquence plus élevée n’atteindront pas l’hélicotréma et seront transmis à travers le conduit cochléaire dans la périlymphe de la rampe tympanique. Dans le canal cochléaire, les ondes sonores entraînent l'oscillation de la membrane basilaire qui vibre entièrement : l’oscillation est maximum aux endroits où les récepteurs de la membrane sont « accordées » avec une fréquence particulière. Les récepteurs de la base de la membrane basilaire répondront si la fréquence est élevée, ce sont les récepteurs près du sommet de la cochlée qui réagiront si la fréquence est basse. La membrane basilaire décompose les sons selon leur fréquence !
Transduction de l’oreille interne
L’organe de Corti, reposant sur la membrane basilaire, est composé de cellules de soutien, de piliers de Corti et d’environ 16000 cellules ciliées sensorielles (une rangée de cellules ciliées internes CCI et trois rangées de cellules ciliées externes CCE). La base de ces cellules est entourée de neurofibres rattachées au nerf cochléaire auditif. A l’autre extrémité des cellules, se trouvent des cils appelés stéréocils en 3 ou 4 rangées : les plus courts baignent dans l’endolymphe les plus longs sont implantés dans la membrane tectoriale du canal cochléaire.
Lorsque la membrane basilaire oscille, les piliers de Corti, les cellules ciliées et la lame réticulaire sont solidaires et indéformables et se déplacent par rapport à la membrane tectoriale, cela provoque l'inclinaison des stéréocils des cellules ciliées. (Les cellules ciliées détectent des mouvements de la taille d'un atome et répondent en une dizaine de microsecondes).
Le déplacement des stéréocils et des cellules ciliées provoque l’ouverture des canaux cationiques laissant entrer les ions K+ présents dans l’endolymphe ce qui entraine une dépolarisation rapide de toute la cellule ciliée. De plus, l’entrée d’ions Ca++ libère le neurotransmetteur qui stimule la fibre nerveuse du nerf auditif. Le déplacement des cils dans l'autre direction provoque la repolarisation de la cellule avec arrêt de libération du neurotransmetteur. Les cellules ciliées s’étirent et se contractent sous l’effet de l’hyperpolarisation et de la dépolarisation, les contractions rapides des cellules externes plus nombreuses servent à amplifier les vibrations mais ce sont surtout les cellules internes qui envoient les messages auditifs à l’encéphale car la majorité des neurones du nerf auditif sont reliés aux cellules internes. L'énergie mécanique se transforme en énergie électrique : c'est la transduction nerveuse de l’oreille !
Fonctionnement du cerveau et le traitement auditif
Les influx générés par la cochlée empruntent les neurofibres du nerf cochléaire puis traversent le ganglion spiral et atteignent les noyaux cochléaires du bulbe rachidien au niveau du tronc cérébral. A noter qu’il existe des neurofibres qui font le chemin inverse du tronc cérébral vers les cellules ciliées. Puis, ces influx se dirigent vers le noyau olivaire supérieur qui est un premier relais. Ce sont les noyaux olivaires qui sont chargés de déterminer la direction du son. Quand les deux oreilles fonctionnent normalement, deux indices permettent aux noyaux de situer l’origine d’un son dans l’espace : la différence d’intensité et d’écart temporel entre les ondes sonores arrivant sur chaque oreille. Les deux signaux se rencontrent sur des neurones appelés neurones sentinelles. Ce relais peut commander des actes réflexes si le traitement effectué décèle un son anormal pour avertir d’un danger par exemple.
Ces influx nerveux transitent par le colliculus inferieur (centre auditif réflexe du mésencéphale) ou tubercules quadrijumeaux qui constituent le deuxième relais. A ce niveau, le traitement auditif décèle aussi des sons associés à certains dangers et il y a alors alerte des centres amygdaliens qui contrôlent la peur, la colère, le stress, les réactions de défense et de fuite…
Les influx passent par le thalamus, le troisième relais pour arriver dans le cortex auditif au niveau du lobe temporal. Ce centre interroge nos cinq sens tous les 1/40èmes de seconde et envoie les signaux vers les centres spécialisés d'interprétation. Mais il fait aussi des synthèses entre les diverses perceptions : vue, ouïe, toucher, odorat et goût pour caractériser leur origine afin de renseigner le cortex central.
Le cortex auditif va interpréter les signaux : il est spécialisé dans l’analyse des sons. La puissance analytique de l’aire auditive est telle que nous sommes par exemple capables de reconnaître différents instruments d’un orchestre. Il est question de traitement cortical des stimuli.
En conclusion, on voit que les ondes sonores émises dans l'air par un instrument sont transmises puis transformées en courant électrique à travers l'oreille externe et l'oreille interne. Ce courant circule à travers le cerveau pour arriver au cortex auditif qui va se charger de l'interprétation des différents signaux reçus. Grâce à cette analyse, notre corps va réagir de façon différente en fonction des divers sons reçus.